La purge
Entre les années 1950 et le milieu des années 1990, les membres 2ELGBTQI+ des Forces armées canadiennes, de la GRC et de la fonction publique fédérale ont systématiquement fait l’objet de discrimination et de harcèlement; nombre d’entre eux ont été renvoyés, conformément à la politique du moment et à une pratique sanctionnée. Dans ce que l’on viendrait à appeler la « purge LGBT », des personnes ont été surveillées, soumises à des interrogatoires, maltraitées et traumatisées.
La purge LGBT a été orchestrée aux plus hauts échelons du gouvernement du Canada et menée avec un mépris absolu de la dignité, de la vie privée et de l’humanité de ses victimes. Enracinée dans la guerre froide, la purge s’est poursuivie au gouvernement fédéral pendant plus d’une quarantaine d’années.
Quelque 9 000 vies ont été brisées pendant cette période, entraînant un traumatisme psychologique toujours profondément ressenti aujourd’hui. La carrière et l’estime de soi de toute une génération de jeunes adultes ont été anéanties. Les victimes ont été privées d’avantages sociaux, d’indemnités de départ et de pensions, et celles qui ont réussi à demeurer en poste se sont vu refuser toute possibilité d’avancement. Suicides, séropositivité, peur, dépression, troubles de stress post-traumatique, toxicomanie, désaveux, criminalisation, rejet, isolement, oblitération – ce chapitre odieux de l’histoire canadienne s’est aussi soldé par de nombreuses expériences douloureuses qui perdurent.
Le règlement
En 2016, des personnes ayant survécu à la purge LGBT ont intenté un recours collectif à l’échelle nationale contre le gouvernement du Canada. Le trio composé de Todd Ross, Martine Roy et Alida Satalic représentait les demandeurs, tous les trois ayant eu le courage de mener la charge au nom des membres du recours collectif.
Une entente historique est intervenue en juin 2018 : on y prévoyait des indemnités totalisant 145 millions de dollars. De ce montant, jusqu’à 110 millions de dollars ont été réservés pour le paiement de dommages-intérêts aux victimes de la purge LGBT.
L’entente affectait également de 15 à 25 millions de dollars à des « mesures de réconciliation et de commémoration. » Offerts par les victimes de la purge LGBT, ces fonds ont valeur de symbole, puisqu’ils représentent les indemnisations qui n’ont pu être versées à certaines victimes de leur vivant, comme l’entendait le règlement, pour les souffrances qu’elles ont endurées.
Les détails du règlement se trouvent dans trois documents juridiques :
- L’entente de règlement définitive, qui définit les modalités de l’entente entre le gouvernement du Canada et les membres du recours collectif;
- La première entente complémentaire, qui donne plus de détails sur le fonds de réconciliation et de commémoration (aujourd’hui le Fonds Purge LGBT);
- La deuxième entente complémentaire, qui définit notamment les activités et le fonctionnement du Fonds Purge LGBT.
- La troisième entente complémentaire (janvier 2022), qui a notamment pour effet de prolonger le mandat du Fonds Purge LGBT jusqu’au 30 juin 2027 et de modifier sa politique de placement.
- La quatrième entente complémentaire (janvier 2023) concerne la collecte d’autres documents historiques sur la purge LGBT.
Le Fonds LGBT Purge
Le Fonds Purge LGBT est une société sans but lucratif; elle a été constituée pour administrer une portion des fonds émanant du règlement. À l’issue du recours collectif, une enveloppe de 23 713 413 $ lui a été remise, somme qui a depuis généré des intérêts.
La société devra cesser ses activités d’ici le 30 juin 2027, date à laquelle elle sera dissoute de façon permanente. Tous les fonds dont elle a la responsabilité devront avoir été utilisés avant cette date.
Le Fonds Purge LGBT est juridiquement tenu d’employer cette enveloppe pour des projets de réconciliation et de commémoration.
Le tribunal lui a confié le mandat de voir à quatre grands projets :
- Créer un monument national à la mémoire des personnes 2ELGBTQI+ qui ont souffert de discrimination au Canada, y compris dans le cadre de la purge LGBT;
- Appuyer l’organisation d’une exposition muséale par le Musée canadien des droits de la personne à Winnipeg;
- Se pencher sur la collecte, la préservation et l’accessibilité des documents historiques relatifs à la purge LGBT;
- Travailler avec le gouvernement du Canada pour mieux inclure les personnes 2ELGBTQI+ dans la fonction publique fédérale et améliorer la formation en ce sens.
Vous trouverez plus d’information à ce sujet dans la section Projets de notre site.
Consultez les états financiers vérifiés du Fonds Purge LGBT:
Le conseil d’administration
Le conseil d’administration du Fonds Purge LGBT se compose de six membres de la direction qui agissent à titre bénévole. Martine Roy (coprésidente), Todd Ross (coprésident), Diane Pitre, Wayne Davis et Linda Goguen-Manning ont survécu à la purge LGBT. Douglas Elliott a représenté les membres du recours collectif à titre d’avocat principal. La directrice exécutive du Fonds Purge LGBT, Michelle Douglas, a elle aussi survécu à la purge
Michelle Douglas – Directrice exécutive
Michelle Douglas a servi comme officière dans les Forces armées canadiennes de 1986 à 1989. Elle a été libérée honorablement de l’armée en 1989 dans le cadre de la « purge LGBT ». Elle a soulevé une contestation judiciaire historique contre les politiques d’exclusion de l’armée à l’endroit de son personnel LGBT, ce qui a mis fin aux politiques discriminatoires du Canada en 1992. Son expérience dans l’armée a marqué le début de 30 ans de militantisme en faveur de la justice sociale et des droits de la personne.
Sur le plan professionnel, Michelle a été directrice des relations internationales au ministère de la Justice du Canada et a pris sa retraite en septembre 2019. Au cours de ses 30 années de carrière comme fonctionnaire, elle a représenté le Canada à des réunions internationales du Commonwealth, de l’Organisation des États américains et du G7, et elle a beaucoup voyagé pour fournir un soutien stratégique au ministre de la Justice du Canada.
Michelle a également siégé à plusieurs conseils d’administration, notamment à titre de présidente pour le centre communautaire The 519 et la Fondation en faveur de l’égalité des familles. Elle a également été impliquée dans le soutien aux réfugiés 2ELGBTQI+ et s’intéresse beaucoup à la question du don d’organes.
Diplômée de l’Université Carleton, à Ottawa, Michelle s’est vu décerner un doctorat honorifique par l’Université Mount Saint Vincent. Au fil des ans, elle a reçu la Citation Fierté Canada et, en 2012, la Médaille du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II. En 2023, elle a été nommée colonelle honoraire des Forces armées canadiennes pour le groupe du Chef – Conduite professionnelle et culture.
MARTINE ROY - COPRÉSIDENTE
Martine Roy a travaillé pendant 20 ans chez IBM, où elle a notamment occupé les postes de coordonnatrice en résolution de situations critiques et de directrice de compte. Au sein d’IBM, elle a mis sur pied des groupes-ressources afin de soutenir les employés LGBT et s’est engagée à fond dans la sensibilisation du personnel et de la direction aux réalités LGBT et dans la promotion d’un milieu de travail inclusif.
Maintenant directrice régionale, développement des affaires 2ELGBTQI+ Québec & l’Est du Canada pour la Banque TD, Martine relève encore une fois le défi avec passion.
Grande militante pour les droits des personnes LGBT, elle a le coeur à ses affaires. Congédiée des Forces armées canadiennes pour son homosexualité à 19 ans,
Martine a mené le recours collectif qui s’est conclu par des excuses du gouvernement fédéral en 2017. Martine a siégé comme membre du conseil d’administration de Fierté au travail Canada durant 10 ans, organisme basé à Toronto qu’elle a fondé avec sept autres personnes. Elle a également été présidente de la Fondation Émergence jusqu’en 2015.
Au fil des années, leader de l’inclusion en milieu de travail, Martine a reçu de nombreux prix et distinctions. En 2017, elle s’est vue décernée la Médaille de l’Assemblée Nationale du Québec. Et en 2023, Martine a été décorée de l’Ordre du Canada en reconnaissance de ses efforts inlassables à titre de dirigeante, de militante et de défenseure de la diversité, de l’inclusion et de l’équité au sein des communautés 2ELGBTQI+.
Todd Ross - COPRÉSIDENT
Todd est l’un des représentants des demandeurs dans le cadre du recours collectif sur la purge LGBT. Il s’est enrôlé dans les Forces armées canadiennes en décembre 1987, à l’âge de 18 ans, et a servi à bord du NCSM Saskatchewan comme opérateur d’équipement d’information de combat (Marine) à Esquimalt, en Colombie-Britannique. À partir de janvier 1989, Todd a fait l’objet d’une enquête par l’Unité des enquêtes spéciales de la police militaire. Après un examen approfondi, il a admis qu’il était gai et s’est vu offrir une libération honorable en mai 1990.
Consultant en affaires publiques, Todd a été conseiller du vice-premier ministre de l’Ontario et du président de la Métis Nation of Ontario.
Il a siégé bénévolement à de nombreux conseils d’administration et s’intéresse tout particulièrement aux questions autochtones, à la santé et aux droits de la personne. Il est l’un des membres fondateurs de Rainbow Railroad, un organisme sans but lucratif créé pour aider les personnes 2ELGBTQI+ du monde entier à trouver asile contre la violence, le meurtre ou la persécution de l’État.
Todd est métis et vit à Saint-Andrews, au Nouveau-Brunswick, avec son partenaire Kirk.
Diane Pitre
Diane Pitre a grandi à Campbellton, une petite ville côtière du nord du Nouveau-Brunswick connue comme la porte d’entrée des Maritimes. Elle s’est enrôlée dans l’armée le 9 novembre 1977, à l’âge de 18 ans, après avoir obtenu son diplôme d’études secondaires. Après avoir terminé l’instruction de base à la BFC Saint-Jean, elle a été affectée à la BFC Chatham (N.-B.) en février 1978 pour suivre une formation de technicienne de cellules. Le 1er avril 1978, elle a été affectée à la BFC Borden (Ont.) pour compléter sa formation et elle est retournée à la BFC Chatham en août 1978. Elle a reçu une nouvelle formation de technicienne en approvisionnement à la fin de 1978 après avoir perdu son habilitation de sécurité parce qu’on la soupçonnait alors d’être homosexuelle. Le 24 septembre 1980, après une longue enquête de deux ans en vertu de l’OAFC 19-20 « Déviation sexuelle – enquêtes, examens médicaux et mesures à prendre », elle a été purgée des Forces armées sous prétexte qu’elle était une menace pour son pays en raison de son orientation sexuelle.
Diane a passé près de 40 ans à faire pression sur le gouvernement afin qu’il lui présente des excuses pour son congédiement injustifié. Elle les a reçues le 28 novembre 2017 du premier ministre Trudeau. Bien que ce chapitre soit terminé, Diane continue de militer pour que l’histoire ne se répète pas! Elle a lancé une page Facebook pour les survivants de la purge LGBT, apporte son soutien à de nombreux anciens combattants 2ELGBTQI+ et est la fondatrice et coprésidente de Vétérans Arc-En-Ciel du Canada. En 2024, Diane a reçu la Mention élogieuse du ministre des Anciens Combattants en reconnaissance de ses décennies de travail auprès des ex-membres des forces armées appartenant à la communauté 2ELGBTQI.
Diane a pris sa retraite de la Société canadienne des postes après une carrière de 30 ans comme bibliotechnicienne, agente des réclamations internationales et agente de réinstallation. Elle est fière d’être membre du Fonds Purge LGBT et attend avec impatience d’entamer le prochain chapitre de sa vie.
Diane est métisse et habite à Campbellton, en Nouveau-Brunswick.
Wayne Davis
Wayne Davis a grandi dans sa ville natale de Drumheller, en Alberta, et est entré au service de la GRC en 1967. Il a été agent de police communautaire pendant huit ans à Duncan et à Sidney, en Colombie-Britannique, avant de commencer à exercer des fonctions administratives. Au cours des dix années suivantes, il a occupé avec brio des postes de direction en finance et en administration à des échelons de plus en plus élevés à Victoria, Vancouver, Ottawa et Toronto. Pendant ses années de service, il a obtenu son baccalauréat en commerce de l’Université de la Colombie-Britannique grâce à l’appui de la Gendarmerie. Wayne s’était élevé au grade de sergent d’état-major après 18 ans de carrière exemplaire quand son homosexualité a été révélée. Il a été expulsé de la GRC en 1986 dans le contexte de la purge LGBT.
À son départ de la GRC, il a connu une longue et brillante carrière dans la fonction publique du Canada, où il a occupé divers postes de direction en ressources humaines, en finance et en administration jusqu’à sa retraite en 2004. Il a ensuite entrepris une troisième carrière en tant que directeur administratif du Département de chirurgie de l’Université de la Colombie-Britannique. Il a pris sa retraite pour de bon en 2015.
Aujourd’hui, Wayne se sent privilégié de pouvoir se consacrer à des enjeux de nature sociale, notamment en travaillant au contact d’organismes communautaires à Vancouver et en défendant les droits de la communauté 2ELGBTQI+. Se donnant pour mission de profiter d’une retraite de gris et d’arcs-en-ciel, il s’investit aussi au sein de groupes faisant la promotion des intérêts des personnes âgées, à qui il offre des services de counseling par les pairs pour divers enjeux. C’est pour lui un honneur de siéger à titre de trésorier et de directeur au conseil d’administration du Fonds Purge LGBT, et de s’employer à conscientiser le public à ce chapitre odieux de l’histoire du Canada.
Douglas Elliott
R. Douglas Elliott est un associé de Cambridge LLP et avocat principal du recours collectif sur la purge LGBT. Il a obtenu son baccalauréat ès arts de l’Université de Western Ontario en 1979, son baccalauréat en droit de l’Université de Toronto en 1982 et a été admis au Barreau en 1984. Spécialiste certifié du contentieux des affaires civiles depuis 2003, il a reçu la Médaille du Barreau en 2010. Doug est un expert reconnu en matière de droits des LGBT, de droit constitutionnel et de recours collectifs, et il est l’auteur principal du Just Society Report.
Doug est bien connu pour son travail sur des cas de jurisprudence constitutionnelle, comme le mariage homosexuel, et il est également un chef de file dans le domaine des recours collectifs. Il a remporté le recours collectif Hislop c. Canada, qui est à ce jour le plus important recours collectif intenté contre le gouvernement fédéral par un groupe de gais et de lesbiennes pour obtenir la pension de survivant du Régime de pensions du Canada. Le règlement s’est élevé à 50 millions de dollars. Il a joué un rôle clé au sein de l’équipe nationale sur l’hépatite C qui a obtenu un règlement de 1,5 milliard de dollars des gouvernements fédéral et provinciaux dans l’affaire Parsons c. Canada, l’un des plus importants règlements dans l’histoire des recours collectifs canadiens.
En plus des nombreux prix qu’il a reçus pour sa contribution à la justice sociale, Doug a été reconnu comme un expert de premier plan en droit public, tant en recours collectifs qu’en contentieux fondé sur la Charte, et comme l’un des meilleurs avocats en recours collectifs au Canada par Best Lawyers in Canada. En 2023, Doug a reçu le prix inaugural Carl-Mitchell pour le rayonnement dans les collectivités, une prestigieuse distinction remise par l’Université de Toronto aux membres de sa communauté diplômée qui, de leurs services offerts à titre bénévole à la communauté, ont fait progresser les principes d’équité, de diversité et d’inclusion. Il figure également dans le Canadian Who’s Who, publié par les Presses de l’Université de Toronto.
Doug et son mari Greg vivent à Elliot Lake, en Ontario.
Linda Goguen-Manning
Linda a grandie dans une grande famille de 11 enfants à Neuville, Québec. Elle s’est enrôlée dans les Forces armées canadienne le 12 octobre 1982 à l’âge de 18 ans. Après avoir complétée sa formation de base à la BFC Saint-Jean et l’école des langues à la BFC Borden, en mai 1983, elle fut mutée à la SFC Shelburne. C’est durant son séjour à la SFC Shelburne qu’elle fut suivie, fouillée et interrogée sous le préjudice découlant du fait d’avoir été perçue comme LGBT. Linda n’a pas perdue sa carrière dans les FAC mais en 1984, elle a changée son métier à commis administratif. Elle a été mutée au Quartier général de la Défense nationale à Ottawa et elle a fini sa carrière en 1996 à la BFC Halifax sous le programme de réduction des Forces (PRF). Linda a 4 autres frères qui ont aussi servis dans les FAC.
Retournant par la suite aux études, elle a effectué un baccalauréat en arts, suivi d’une maîtrise dans la même discipline en 2022. Elle s’est attiré un prix de distinction du Sénat, de même qu’une médaille pour l’excellence du sous-ministre d’Anciens Combattants Canada, d’où elle a récemment pris sa retraite.
Linda aime voyager et cuisiner. Linda et son mari de 37 ans, Anthony, ont deux enfants; Jonathan, qui est un architecte à Halifax, et Justin, qui est un technicien en électronique à la Défense nationale, à Halifax. Elle est fière d’être la mamie à Charlotte Jane, Henry Thomas et Emilia Lynn.
En tant que personne handicapée, membre à la retraite des FAC qui a vécu des événements liés à la purge et que son fils aîné est un homme gai, Linda est une alliée forte pour les communautés 2ELGBTQI+ et la Purge LGBT.